Formation artistes-auteurs : « Écrire et illustrer pour la jeunesse »

Bénédicte de Soos et Juliette Roux animent régulièrement la formation conventionnée destinée aux auteurs  : « Écrire et illustrer pour la jeunesse » à distance ou dans nos écoles de Paris, Lyon ou Bordeaux. Juliette Roux anime la partie « illustration » pour envisager l’album jeunesse dans sa totalité. 

Nous avons rencontré Bénédicte de Soos qui a publié une vingtaine de livres pour les enfants et collaboré pendant 10 ans aux magazines de Bayard Presse Jeunes (illustration en tête d’article Juliette Roux pour les éditions Milan).

L’Inventoire : Y a-t-il une spécificité de l’écriture jeunesse ?

Bénédicte de Soos : Je dirai oui et non. Oui pour les très jeunes enfants et ceux qui abordent seuls leurs premières lectures, vers 6/7 ans. Ils ont besoin de textes adaptés à leur âge, avec un seul thème, des phrases courtes, peu de personnages… Hormis ces contraintes il n’y a pas de réelle spécificité.

Les termes « littérature jeunesse » recouvrent un secteur économique, multiple, créatif, innovant. Mais on peut lire ces livres à tout âge et les adultes se régalent lorsqu’ils les lisent aux enfants. Ce qui laisse à penser qu’il n’y a pas d’écriture spécifique jeunesse. D’ailleurs, parlerait-on d’une écriture pour la vieillesse ?

Comment avez-vous commencé à écrire pour les enfants ? Et pourquoi ce choix ?

J’ai commencé à écrire pour mes enfants et j’ai ensuite proposé mes textes à des éditeurs. J’étais journaliste et suis passée assez facilement d’une écriture à une autre. Je l’ai fait parce que ne pouvant plus voyager pendant les années où mes enfants étaient petits, j’ai lâché provisoirement le journalisme et n’ai pas trouvé mieux que d’écrire des histoires pour eux. C’est certainement une des expériences les plus merveilleuses de ma vie.

Image prise lors des Portes Ouvertes Aleph-écriture

Qu’est-ce qu’il faut déterminer d’abord quand on écrit une histoire pour les enfants : La tranche d’âge, le style d’écriture ou le sujet de l’histoire ?

Avant tout il faut lire énormément d’histoires, des courtes et des longues, illustrées ou pas, des contes, des récits, des documentaires… pour savoir dans quel genre on se sent le plus à l’aise. Ce choix aide ensuite à déterminer la tranche d’âge.

Quant au sujet et au style, c’est très personnel. Des écrivains savent très bien sur quels thèmes ils veulent écrire quand d’autres cherchent longtemps l’inspiration. Tout cela s’apprend et se travaille.

Faut-il s’exprimer comme un enfant pour écrire aux enfants ?

Certainement pas, il faut parler « à » l’enfant sans parler « comme » l’enfant, de même qu’il faut éviter les écritures bêtifiantes en pensant que l’enfant comprendra mieux. Il faut être accessible, avoir un style concis et simple pour les plus jeunes.

Après, tout livre d’enfant doit pouvoir être lu par des adultes sans les ennuyer. Un écrivain, jeunesse ou pas, et encore une fois je n’aime pas faire le distinguo, doit chercher et trouver son propre style. On doit reconnaitre ses livres.

L’écriture jeunesse est-elle d’abord l’objet d’une commande d’un éditeur (à des fins pédagogiques ou socio-culturelles par exemple); et de quelle marge de liberté et de proposition dispose l’auteur vis-à-vis de l’éditeur ?

De nombreux auteurs envoient spontanément leurs textes aux maisons d’édition. Et heureusement pour les éditeurs, car comment découvriraient-ils de nouveaux talents ? Il est vrai que les éditeurs organisent leurs catalogues en collections et ils aiment que les manuscrits « rentrent » dans ces fameuses collections. Pour des raisons commerciales et notamment de ventes à l’étranger. Il faut donc en tenir compte. Mais faire un livre sur commande n’a rien de déshonorant si le cahier des charges vous convient. Personnellement j’ai fait les deux et les commandes m’ont offert la liberté d’écrire hors commande.

Y-a-il un format, un nombre de signes par collection et/ou par tranche d’âge, et si oui combien ?

Un livre pour les tout-petits, ce sont surtout des images et deux ou trois phrases par page, soit un maximum de 1500 signes. Les textes pour les 3/6 ans font autour de 3 500 signes, ceux pour les 6/12 ans font entre 8000 et 15 000 signes. Quant aux romans pour pré-ado et ado, fiction romanesque, dystopies et autres, ils tournent autour de 200 000 signes. Mais il n’y a pas de limites.

Combien de livres jeunesse faut-il écrire par an pour en vivre ?

Ce n’est pas le nombre de livres écrits qui compte mais le nombre d’exemplaires vendus par livre. L’économie du livre n’est pas très favorable aux auteurs qui ne touchent qu’entre 3 et 6% du prix d’un livre. Il faut donc en vendre beaucoup pour en vivre !

Pensez-vous qu’il est plus difficile d’écrire pour les enfants que pour les adultes, et si oui pourquoi ? (Stevenson disait que c’était plus difficile et Michel Tournier également).

Je pense que cela dépend de l’écrivain. Celui qui a un imaginaire riche et une écriture concise aura moins de mal que l’auteur qui a besoin de 400 pages pour raconter sa dernière conquête. Je plaisante un peu mais je ne sais pas si Proust aurait pu écrire pour les enfants. Je dirai que les deux sont difficiles, tout aussi exigeant et enthousiasmant.

DP

Prochaines dates de début de formation : 25 mars, 22 avril, 27 mai 2024.

Bio-bibliographie de Bénédicte de Soos

Journaliste, auteur de livres jeunesse, rédactrice pour les entreprises a publié une vingtaine d’ouvrages pour les plus jeunes: Désiré, Dame Grenouille, Les Dubronchon… dans la collection Les Belles Histoires chez Bayard Editions, des documentaires sur les animaux, les métiers et des bandes dessinée pour les magazines Youpi et Pomme d’Api chez Bayard Presse, des documentaires romancés chez Casterman, Fleurus...: la série des Martin, Maman attend un bébé, Deux petits nuages en voyage, Passe-casquette et petits gâteaux... Pour les 6/12 ans, elle a rédigé un documentaire, Le corps et la vie et des histoires pour le magazine Astrapi chez Bayard Presse. Plus tard, elle a conçu des campagnes pédagogiques pour les enfants de 6/12 ans.