Laurence Faure : comment pitcher son projet ?

Présenter son livre dans un ascenseur à un éditeur comme à Hollywood ou s’entraîner à pitcher son livre à n’importe qui, est peut-être une manière de se mettre en condition pour aller à la rencontre d’un éditeur. Cela peut être dans un salon, dans la rue, ou tout simplement dans les mots à employer pour présenter son livre au moment d’envoyer son livre à un éditeur. L’oralité et la justesse de la voix est ce qui va toucher l’autre. Encore faut-il la trouver. Rencontre avec Laurence Faure, auteure, comédienne et spécialiste du pitch.

L’Inventoire : S’entraîner au pitch. S’agit-il du pitch d’un livre, d’une histoire ? En quoi consiste cet atelier ?

Ce stage de deux jours (les 25 et 26 mars), est une proposition pour s’entraîner à présenter son projet artistique dans un cadre professionnel. Dans le cadre de la présentation d’un manuscrit à un éditeur.

Savoir faire un pitch, c’est aussi savoir de quoi parle son livre, non ?

Ce n’est pas tant « savoir faire un pitch », qui renvoie au vocabulaire du cinéma que s’entraîner à parler de façon claire, concise et maîtrisée à un interlocuteur qu’on veut toucher et convaincre.

Le pitch au cinéma, c’est une phrase qui donne la ligne directrice du récit : Qui s’apprête à faire quoi. Il donne une perspective mais ne dit pas tout pour donner envie  de le financer, si on est producteur, ou d’en savoir plus en allant voir le film, si on est spectateur !

Ici, s’entraîner au pitch, c’est s’entraîner à présenter son projet, son manuscrit dans un temps réduit. C’est tout à la fois être attentif à ce qu’on raconte, à qui on le raconte, comment on s’y prend, et pour quelle finalité.

Ce procédé emprunte-t-il à l’écriture de scénario ? Ne dis-t-on pas qu’il faut faire le pitch, l’accroche, le thème et le résumé avant de se lancer dans l’aventure de l’écriture d’un scénario (avec le plan en 5 étapes de l’histoire) ?

Oui, tout à fait.

Vous êtes en plus d’être auteure, également comédienne.

Je suis consultante formatrice et coach aussi ! j’interviens en communication depuis une quinzaine d’années en entreprises, écoles, boites de formation.

La part de l’expression orale et du plaisir d’exprimer l’histoire qu’on a envie de raconter est-elle importante dans votre stage ?

Cette part est fondamentale ! Convaincre une personne tient tout autant au fond qu’à la forme, à ce que je vais dire qu’à la façon dont je l’adresse, à la qualité des  arguments que je choisis,  de la narration que je déploie qu’à l’énergie que j’engage pour capter l’attention, l’intérêt de mon interlocuteur. Il faut entrer en relation.

Donnez-nous un exemple de pitch d’un livre, très connu. Je pense à « La recherche du temps perdu » par exemple, un cas extrême. Et autre exemple d’un livre que vous aimez, très court ?

La recherche du temps perdu ? Rien que ça ? Pas facile ! Peut-être je dirais ceci : un homme raconte différents épisodes, à différents âges de sa vie, et les racontant devient écrivain…

Et parce qu’un film sort ces jours-ci sur Edmond Rostand, pour « pitcher » Cyrano de Bergerac, je dirais ceci : un homme plein de panache mais complexé par une tare physique cherche à séduire une femme par bellâtre interposé.

Cela marche-t-il avec tous les manuscrits ?

Je n’en sais rien ! Je ne connais pas tous les manuscrits ! Que veut dire marcher ? Donner une vision synthétique qui satisfait l’auteur ? Qui donne envie au lecteur de s’y plonger ? Qui engage le professionnel à s’y intéresser ? Voilà trois points de vue différents.

S’entraîner au pitch ne concerne pas que les manuscrits mais les projets en général. Il s’agit de parler de ce qu’on veut faire, de ce qu’on a fait, de façon claire, directe à un interlocuteur qu’on ne traite pas de façon impersonnelle.

S’entraîner au pitch, c’est s’entraîner à ne pas rester sur son territoire et à se dire : quels chemins prendre pour attirer l’attention de l’autre, pour qu’il comprenne ma proposition et pour qu’il ait envie d’y participer ?

L’idée n’est pas de tout dire mais de susciter un réel intérêt en transmettant des éléments clairs et une énergie.

Pensez-vous que si on ne peut pas résumer son livre, c’est qu’il n’est pas totalement abouti ?

Ce sont deux choses que faire et parler de ce qu’on fait. C’est en étant en situation d’en parler à un autre, qu’on clarifie, pour l’autre et pour soi, ce qu’on veut réaliser. Le pitch, encore une fois, n’est pas un résumé. Il n’enferme pas en aplatissant toute tentative de subtilité. Mais il oblige son auteur à avoir une vision synthétique sur son travail. Il oblige à préciser la ligne directrice et à donner désir d’en savoir plus. Alors, si après plusieurs tentatives, propositions, échanges  avec des proches, cette ligne n’apparaît pas… c’est peut-être qu’il faut… resserrer !

Pour me permettre ici un pas de côté, j’ai rencontré souvent des personnes qui « construisaient » – texte, pièce, spectacle –  mais toutes n’étaient pas à l’aise pour parler de leur construction. Certaines personnes avaient besoin d’un regard, d’une sensibilité extérieure pour verbaliser et préciser. Après cet accompagnement, elles pouvaient ensuite s’adresser à un tiers dans le cadre professionnel. L’œuvre, la construction était là mais transmettre des informations sur son profil, son contenu, sa singularité à un autre paraissait compliqué, ou n’avait pas été envisagé.

Et puis n’oublions pas ceci : je parle de mon projet à un autre. Qu’est-ce que j’attends lui ? Qu’il me comprenne ? M’encourage ? Me finance ? M’accompagne dans mes démarches ? La multiplicité des interlocuteurs potentiels entre le proche, l’ami, le financeur, le conseil, le responsable institutionnel rend compte de l’importance de la préparation. Il faut s’entraîner, et passer de l’intérieur de la création à l’extérieur de sa socialisation.

Abordez-vous la lettre de couverture aussi ?

Non. Le stage concerne la partie rendez-vous. Mais il est vrai que c’est un élément important.

Que peuvent attendre les participants de ce stage ?

C’est à eux de le déterminer. Ce stage propose des repérages – comment je suis quand je cause face à d’autres pour parler de mon projet  – , des outils – construire, faire vivre, entrer en relation et dialoguer -, c’est ensuite au participant de s’en saisir.

Le stage de Laurence Faure « S’entraîner au pitch » aura lieu le lundi 25 et le mardi 26 mars à Paris. En savoir plus ici.

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