Parution du N°49 de la Revue Rue Saint Ambroise

La revue Rue Saint Ambroise a été créée en 1999. Depuis ses débuts, elle cherche, et trouve, ces nouvelles affranchies du classicisme qui sont en phase avec notre époque et transforme notre perception des histoires courtes. Le numéro 49, tout juste paru, offre en 30 histoires un panorama contemporain de ces narrations aux accents inattendus.

« Un mois ou la limite du langage » de Jade Segalen fait fi de tous les codes habituels, en construisant son texte à partir d’un dialogue. Dans une mélopée rapide et effervescente, nous sommes plongés dans les débuts d’une histoire d’amour entre une jeune-femme et un homme plus âgé. Un mois. Est-on déjà en couple?  Est-on engagé ou pas ? Un jeu de questions-réponses sur le fil du rasoir qui prend les allures d’un suspense insoutenable. Très vite, l’absurde de la conversation prend une subtilité vertigineuse, débusquant sous les non-dits la véritable position de l’un et de l’autre (Jade Segalen a publié en 2021 chez Kiwi un roman « Née par hasard dans un monde qui s’en fout ». Un titre raccord avec le style de sa nouvelle).

Hors des sentiers du quotidien, le recueil laisse aussi place au surnaturel et au fantastique. Ainsi, la revue s’ouvre sur un inédit de Cortázar « Les mains qui grandissent », donnant le la aux histoires sous-tendant ce recueil. L’envoûtante nouvelle « Le journal de la rose » de Sylvia Lulin (auteure jeunesse), s’inscrit dans ce registre. Un couple de gardien se voit confier la garde d’une somptueuse rose, et décide d’en tenir le journal. Quel pouvoir aura t-elle sur eux ? Comme dans « Voisins », de Raymond Carver (où un couple arrose les plantes de voisins partis en vacances), l’aventure révèlera des gouffres insoupçonnés dans leur relation. »En colocation », de Victor Wright, revisite un Bartleby contemporain, menacé de disparition à l’heure des réseaux sociaux. « Pas de gras » de Jean-Jacques Jouannais (auteur de théâtre et d’un roman fantastique), est aussi une histoire à la conclusion surprenante, que rien ne laisse soupçonner au départ.

Impossible de citer tous les auteurs qui ont contribué à ce numéro puisqu’ils sont trente; il faut se laisser porter par ces histoires qui révèlent au détour de la plus banale des actions de ces personnages, un tout autre aspect de ce que nous croyions vivre. Comme d’aller, à contrecœur, visionner un film entre midi et deux chez un collègue, avant de se retrouver plongé dans la troisième dimension (La fin du monde, premier texte de Mira Martin).

Rue Saint-Ambroise est une revue qui laisse la place belle aux histoires courtes, trois fois par an, et constitue une des rares tribunes de la nouvelle en France aujourd’hui. On peut également découvrir tous les auteurs qui y ont contribué (même les auteurs non retenus, preuve de leur engagement de lecteurs). Une revue concernée. À se procurer d’urgence sur leur site !

DP

La maison d’éditions Rue Saint Ambroise a également créé une collection de recueils en forme de manifeste de la nouvelle moderne: « Les meilleures nouvelles ». On y trouve notamment “Les meilleures nouvelles de : Sherwood Anderson », « F.S. Fitzgerald », « Anton Tchekhov » et « Virginia Woolf ».