« Dure comme pierre », Pauline Giard

Ce texte a été écrit sur une proposition d’écriture de Valérie Mello à partir de Sugar Street de Jonathan Dee. Il figure parmi les sept textes sélectionnés.

Pauline Giard

Dure comme pierre

Mon nom est Béryl. Pourquoi pas ?

Béryl. Un nom dur, tranchant. Qui vous donne envie d’en savoir plus mais pas l’autorisation de le demander.

Ce que je faisais au cirque ?

Rien.

Comment ça rien ?

Je ne faisais pas, j’attendais.

Un signe, une main tendue… trop poétique ? Et pourtant.

Alors un clown, j’attendais un clown, de ceux qui ne font plus rire personne et n’osent plus se regarder dans le miroir quand ils enlèvent leur maquillage. Je ne le connais pas depuis longtemps, non, juste assez pour savoir qu’il n’est pas à sa place, là-bas.

Son nom ? Ringo. Un bon nom de clown, un nom qui prête à rire sans qu’on sache pourquoi. Rien qu’en le prononçant on esquisse un sourire vous voyez ?

Non, Ringo n’a pas de frère. Un cousin, oui sûrement, un cirque c’est avant tout une grande famille, des oncles, des neveux, des grands-mères pourquoi pas. Alors des cousins, vous pensez… ça se charrie à la pelle ! Remarquez que moi, je n’y connais rien, aux cousins. Je suis fille unique. Orpheline.

Seule au monde… trop dramatique ? Et pourtant.

Je suis adoptée donc, et mes parents sont partis en Amérique… au Canada. La Californie, ça donnerait envie de jeter un coup d’œil, mais là-haut il fait trop froid pour qu’on aille les déterrer… c’est une image, vous vous en doutez.

Chamboulée par ma découverte ?

Oui.

Stoïque ?

Oui, encore plus. J’ai appris à l’être. Soyez sérieux. Vous voyez une Béryl tomber dans les pommes ? Moi, certainement pas !

P.G.

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