« Le bruit des choses éteintes », Marie-Julie Lemaître

Le bruit des choses éteintes‬

Il y a cette plage.‬
‭Pas vraiment vide.‬
‭Juste vidée.‬

‭Le vent passe au ralenti.‬
‭Il ne cherche plus à convaincre.‬

Un lampadaire se dresse,‬
‭trop droit pour être honnête.‬
‭Sa lumière tombe comme une injonction,‬
‭froide, propre, sans appel.‬

Des ombres s’étirent,‬
‭rangées, disciplinées.‬
‭On dirait qu’elles n’osent plus débattre.‬

Deux silhouettes au centre.‬
‭Ni proches, ni lointaines.‬
‭Alignées comme des questions qu’on reporte.‬
‭Elles marchent,‬
‭ou font semblant.‬
‭Comme on fait semblant d’aller bien,‬
‭en enfilant ses pas comme un vieux pull.‬

Les maisons ferment les volets.‬
‭Dignité de façade.‬
‭À l’intérieur,‬
‭des cris muets‬
‭et des dimanches qui s’éternisent.‬

La mer est loin.‬
‭Le sable reste.‬
‭Sec, lisse, presque dévitalisé.‬
‭On dirait un souvenir mal conservé.‬

Je regarde.‬
‭Pas pour comprendre.‬
‭Pour sentir ce que ça remue,‬
‭là où c’est resté coincé.‬
‭Ce n’est pas un lieu.‬

C’est un état.‬
‭Celui où rien ne bouge,‬
‭mais tout menace de basculer.‬

‭Le silence fait du bruit.‬
‭La lumière dissèque.‬
‭Et le ciel retient sa chute.‬