Bart Moeyaert, auteur belge, publié pour la 1ère fois à 19 ans explique comment son vécu d’enfant malade et fragile lui a inspiré son premier roman de 12 pages, L’Enfant aux médicaments, écrit à l’âge de 9 ans. Les années suivantes, son état de santé le plonge dans un certain isolement familial et scolaire mais libère sa plume et son envie d’écrire. À partir d’un dessin vu dans un journal, il écrit alors une nouvelle histoire. Mais c’est à l’adolescence qu’il décide d’écrire un journal intime et de s’en inspirer pour un roman plus riche, plus étoffé qui sera publié 3 ans plus tard, l’année de ses 19 ans. Née de son imagination, il crée Judith, un personnage féminin; une amoureuse imaginaire qui lui tient compagnie en classe et devient sa muse. On voit bien ici comment l’inspiration trouve sa source dans une plaie du vécu à un instant T, et comment le très jeune romancier qu’est Bart Moeyaert à l’époque, entre dans le processus de création. Outre le désir, le besoin et le plaisir d’écrire, on trouve aussi l’instinct.
« Dans l’écrit, il est donc important d’utiliser des formes qui leur permettent des échappées à tout moment. Il faut à la fois des entrées dans l’histoire et faire en sorte que les enfants puissent en sortir à tout moment. Et le rire, bien sûr, est une bonne échappatoire. Parfois, les enfants rient à des moments où aucun adulte ne rirait, dans des passages même dramatiques, parce que c’est une échappatoire justement. »1C’est d’ailleurs par là qu’a commencé Michael Morpurgo, 3ème et dernier auteur jeunesse cité lors de cette conférence. Son premier livre « réussi », dixit l’auteur, fut Cheval de guerre dans lequel il parle des souffrances engendrées par la guerre à travers le regard d’un cheval.2Lui aussi soutient la thèse d’histoires fondées sur la réalité et ses difficultés. L’imaginaire, oui, mais il doit être ancré dans « un nœud vraiment vrai »1. C’est pourquoi il part toujours d’un événement réel ou une anecdote vécue : un japonais découvert sur une île déserte du Pacifique 28 ans après sa disparition3, une femme travaillant au zoo de Belfast qui décide d’héberger un éléphant dans son jardin pour le sauver des bombardements allemands4…Ainsi, il prend l’habitude de découper tous les articles de journaux qui l’intéressent et qui pourraient lui être utiles d’une manière ou d’une autre.
« Si on écrit, il faut qu’on réfléchisse sur une vision honnête du monde. Je ne veux pas créer un monde idéalisé pour les enfants, je ne veux pas de rubans autour des histoires. Pour les tout-petits, il est très important que cela se termine bien. Mais il y a un âge, vers 6-7 ans, où l’enfant commence à apprendre que oui, il y a des difficultés. »1
Il semble donc que la littérature jeunesse se rassemble autour d’un consensus : l’imaginaire, oui, mais il doit être porteur de sens dans la réalité ; l’imaginaire, oui, mais il doit servir l’enfant sans édulcorer les difficultés de la vraie vie; l’imaginaire, bien sûr que oui, mais il doit être fidèle aux besoins des lecteurs.
M-H. M.
Retrouver ce numéro de la revue, en détail, ici.
1 La revue des livres pour enfants, BnF, Hors série N°2 – Secrets d’auteurs
2 Roman adapté au cinéma par Spielberg en 2012.
3 Fait divers qui lui inspire Le Royaume de Kensuké
4 Fait divers qui lui inspire Loin de la ville en flammes




