« Andante », Sophie Destribats

Andante

Nous marchons sous des soleils factices

Sur le sable martelé

 

Par une compagnie de petits sangliers

Qui dans la journée s’étaient gavés de melons

 

Droite et droit dans la nuit nous marcherons jusqu’au matin

Nous traverserons la nuit

Sans peur

Et rirons aux éclats

Notre gorge déployée offerte au ciel

Et jetterons les éclats de nos rires

Par-dessus nos épaules

Comme une coupe de champagne

Bue

 

Sous nos pas le sable encore humide crisse comme la doublure d’un imperméable

Il n’y a pas d’autre bruit

Nous traversons un paysage d’éternelle promenade

Sous la lumière crue des hauts lampadaires

 

Des gens tranquilles nidifient

Dans d’anciennes maisons cossues

 

Rien ne pourra nous arriver

 

Il est tard déjà

Un vent salin se lève

Nous clignons des yeux

Nous nous léchons la commissure des lèvres

Notre langue rapporte de minuscules cristaux

Ce ne sont pas des larmes

Le jour est loin

 

Dans l’anse

Un homme seul

Se coule dans l’eau noire

Invisible

Il nage vers les petites lumières qui bordent la côte

 

Notre bateau file au vent

Salin

Il ne peut rien nous arriver

 

Le flux et le reflux se murmurent des secrets

Sur le sable

Nos pas s’érodent

Dans les maisons cossues

Les petits sangliers se régalent de melons succulents

 

 

Le vent salin s’est levé

Il fait un peu froid à présent

Et voici que je me tiens en arrière

J’ai peut-être emmêlé mes lacets

Je les vois s’éloigner

Dans le couloir de lumière des soleils factices

 

Dans le temps

 

Il ne reste que des contrastes

D’encre

Formes            ombres            lumières

Et la texture du sable

Irréductible

 

Main dans la main

Nous sommes passés

 

Dans le fouillis de la forêt

Les petits sangliers repus

Dorment

 

Trainer encore

Un peu