Pour écrire, il faut une « chambre à soi » déclare Virginia Woolf. Ou plutôt un lieu à soi. En retraduisant le texte de l’autrice féministe britannique, Marie Darrieussecq a modifié le titre de ce célèbre recueil de conférences dont le titre original est « A room of one’s own ». Ne confondons pas « room » et « bedroom », plaide l’autrice et traductrice française. Il ne s’agit pas de cantonner les femmes à la chambre et à l’espace privé.
Dans ce texte, l’autrice de Mrs Dalloway montre combien il était difficile pour une femme de trouver les conditions pour écrire. Sa compatriote Jane Austen, qui écrivait dans le salon et cachait ses textes, a, certes, réussi à publier de nombreux romans, mais ces inconfortables conditions d’écriture ne favorisent pas l’aboutissement d’un projet.
Un lieu à soi, c’est ce que peuvent s’offrir les écrivains quand ils arrivent à vivre de leur plume. Maylis de Kerangal dispose d’un espace de « douze mètres carrés au sixième étage d’un immeuble du Marais, à Paris ; un petit bureau qui tourne le dos à la fenêtre orientée nord. » Ce lieu consacré à l’écriture n’est pas situé à l’intérieur de la maison. Le centre du dispositif est « la chambre » par apposition à « la casa », explique-t-elle. Elle s’y rend en général de 9 à 18 heures depuis qu’elle se consacre totalement à l’écriture. C’est un lieu isolé mais aussi secret. Interrogé, son éditeur de chez Verticales, Yves Pagès, explique qu’il ne s’y est jamais rendu.
Bien sûr, tous ceux qui écrivent n’ont pas la possibilité de disposer d’un lieu totalement dédié à leurs projets d’écriture. Alors, comment trouver un lieu à soi ? Les femmes ont un plus large accès à l’espace public qu’au début du XXème siècle, il leur est donc possible d’écrire dans les bibliothèques ou les cafés. Et nous disposons d’outils précieux pour faciliter l’organisation. On peut désormais transporter son ordinateur très facilement et synchroniser des fichiers avec son téléphone…
Pourtant cela ne suffit pas toujours. Bien des participants que nous rencontrons en atelier nous confient que l’atelier est un espace/temps neutre dans lequel ils peuvent totalement se consacrer à l’écriture. Le calme y règne (les téléphones sont éteints !), ils sont entourés par un groupe entièrement concentré sur l’écriture et ils s’offrent au moins trois heures de pause dans leur quotidien.
Lieu privé ou lieu public, où se situe votre atelier d’écriture ?
Camille Berta animera l’atelier « Chambre avec vue » à l’Hôtel Marais Home le 4 novembre 2025. Ce sera l’occasion de vous souvenir des chambres qui ont compté dans votre vie.
Source : Le Monde, 10 juillet 2015