Un poème aux jardins du Palais-Royal

Photo MH Mas
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Par Marie-Hélène Mas

Depuis le 4 mars dernier, dans le cadre du 18ème Printemps des Poètes, le Centre des monuments nationaux propose une balade littéraire au cœur du jardin du Palais-Royal. Dix chaises-poèmes, « Les Confidents », créées par le sculpteur québécois Michel Goulet accueillent les curieux en quête de vers et de prose, de classique et de moderne.

Impossible de manquer ce rendez-vous avec quelques-uns de nos plus grands poètes dans un jardin ensoleillé et bourgeonnant au cœur de Paris ! Espace intime de partage et de (re)découverte, ces causeuses poétiques invitent à la paresse, pour une pause lyrique.
Sur chaque dossier, des rimes et des noms : Victor Hugo, Guillaume Apollinaire, Emily Dickinson, Ghérasim Luca, … Assemblées par deux, soudées les unes aux autres comme des sœurs siamoises, ce sont des chaises musicales mais ici, on ne joue pas, on savoure !

Adossé sur ces illustres noms, on branche son casque audio pour écouter, au hasard, quelques stances, contes ou sonnets.

Photo MH Mas
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Piccoli et Baudelaire

« J’ai plus de souvenirs que si j’avais mille ans.
Un gros meuble à tiroirs encombré de bilans,
De vers, de billets doux, de procès, de romances,
Avec de lourds cheveux roulés dans des quittances,
Cache moins de secrets que mon triste cerveau. »
Spleen, Charles Baudelaire (1821-1867)

C’est la voix grave et inspirée du comédien Michel Piccoli qui résonne dans les écouteurs … Il porte et emporte chaque alexandrin sur des flots mélancoliques et mélodieux qui apaisent l’âme et le cœur.

Mythes et amours

« Regarde, spectateur, remontée à bloc, de telle sorte que le ressort se déroule avec lenteur tout le long d’une vie humaine, une des plus parfaites machines construite par les dieux infernaux pour l’anéantissement mathématique d’un mortel. »

Ainsi parlait Jean Cocteau (1889-1963) de sa pièce de théâtre La machine infernale inspirée du mythe d’Œdipe. Ce magicien, grand amoureux des arts (cf article sur Lucien Clergue), s’est approprié quelques grandes légendes grecques avec une esthétique sobre, lumineuse, unique.

Photo MH Mas
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Ecoute et respire

« OUF dit la femme qui mange la soupe aux lentilles
Et sonnent les heures au clocher de l’église
OUF dit la femme qui est essoufflée de courir, ranger,
Allaiter, jouer, administrer, promener, sourire, aimer,
Cuisiner, courser
OUF OUF OUF dit la femme au petit répit de soupe aux lentilles
OUF dit la femme au cirque de Mourèze
OUF dit la femme qui gravit la montagne
OUF dit la femme qui prend le TGV
OUF dit la femme qui arrive au-dessus des escaliers
OUF dit la femme aux sacs de course
C’est qui la femme qui dit OUF OUF OUF ?
C’est TOI ! »
OUF (recueil avec CD) de Laurence Vielle, éditions Maelström, 2015.

Face à la grande fontaine circulaire au centre du jardin, le timbre de la poétesse circule, envahit, séduit, convainc, … On s’identifie tellement bien à cette femme qui dit OUF, qu’à la fin de la dernière strophe, on en est presque à bout de souffle.

Murmures et clameurs

Sébastien Lespinasse est un poète sonore.

Difficile donc, de rendre ici un hommage à ses textes puisqu’il ne se lit pas, il s’écoute. C’est un essayiste, un novateur, un expérimentateur qui revendique un style poétique sonore, ou comment les bruits, sons et transes de la voix peuvent accompagner les strophes scandées comme des slogans.

Pour découvrir un de ses prestations, cliquez ici.

Soyez donc les bienvenus, amateurs, profanes, experts, indécis, connaisseurs et débutants, sur les chaises-poèmes du Palais-Royal, sur les traces fleuries de nos chères poétesses, de nos précieux écrivains !

M-H. M.

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