« Jazz », Marie-Claude Pipet

Jazz

Ma langue est un continent dérobé

Rugueuse elle frétille s’enhardit         S’enflamme

 

Se propage t’enlace t’estourbit

Brouille les pistes se retire te flaire nous cajole

Se délie jazz claque         Te recouvre

 

Exige la saturation

nous porte aux au-delà des baïnes et des courants d’eaux

 

Elle ne sait pas ma langue éprise de qui de quoi

Arpente tes sols

Soulève les cartes et les terrains

Tout en muscles d’ondulations

Ma langue cherche une plage sous l’horizon

A l’usage des jeux et nuits de sable

Ma langue à la tienne relie ses cordons

 

Encore faut-il

Que nos deux langues attrapent la mesure

d’où les francs-parlers surgissent

 

Car rien n’est plus loin qu’un jour sans toi

Quand nos langues démises

Couvent une graine de non recevoir

Monstres à la fête

Laissent déborder nos rêves

Nos langues sèches détournent ce qu’il reste à faire

 

Sans avoir appris

Nous parlons toutes les langues

Portées par d’étranges fabulations

De fossiles à dissidents voyageurs

Nous assaisonnons les mortes et les vivantes

 

Et langues bandantes

Nous embrasons tous les rouages et les reflets du monde