Les lieux d’écriture de Marianne Jaeglé

Marianne Jaeglé est romancière et formatrice chez Aleph, elle a publié en 2011 Un instant dans la vie de Léonard de Vinci et autres histoires (L’Arpenteur, Gallimard, 2021) », un recueil de textes qui nous fait entrer dans l’atelier d’écrivains et de peintres. Le magazine en ligne Ernest l’a interrogée à son tour sur ses lieux de création, avec quatre autres auteurs. Nous publions ici un extrait de cette interview réalisée par Rebecca Benhamou.

C’est à Paris, face au Canal Saint-Martin, dans un café où elle a ses habitudes depuis 14 ans, que la romancière et animatrice d’ateliers d’écriture nous reçoit. « L’écriture, et plus largement la création, est quelque chose que nous aimons romancer, mais la réalité n’est pas faite que de joies, de fulgurances ou de vie de bohème. C’est aussi un quotidien rythmé d’échecs et de dépendances économiques, avec lequel il faut apprendre à composer. » Pour elle, l’écriture se fait en deux temps… et en deux lieux. « Il y a d’abord une phase que je qualifierais de dionysiaque, c’est-à-dire de liberté absolue, de lâcher prise, pendant laquelle je m’aventure dans l’inconnu, sans chercher à prévoir quoi que ce soit. Ce moment-là a lieu forcément dans ce café, en extérieur, qu’il pleuve, qu’il neige ou qu’il vente, face au miroir sombre qu’est l’eau du canal, au passage des mouettes et des saisons, munie d’un carnet et d’un stylo. »

« Il y a d’abord une phase que je qualifierais de dionysiaque, c’est-à-dire de liberté absolue… Ce moment-là a lieu forcément dans ce café »

Le froid, explique-t-elle, est une sorte de minuteur naturel ou de contrainte qui l’incite à se mettre à l’ouvrage rapidement, et à tirer profit du temps imparti. Quant à la deuxième phase, plus « apollinienne », elle correspond à la recherche d’une structure, d’une composition du roman, et d’une remise en ordre de ses écrits, face à son écran d’ordinateur, cette fois-ci.

« Cette phase-là a lieu dans l’intimité de mon domicile, où je n’ai pas de bureau ni de chambre à moi. » L’essentiel étant, selon elle, de créer un moment de rupture avec le cocon – une vision que partage en partie la romancière et enseignante Nathalie Cohen, autrice de Modus Operandi. La secte du serpent (Denoël), et d’Un Fauve dans Rome, à paraître en février 2022 chez Flammarion.

La quête d’un ailleurs serait inextricablement liée à l’aventure littéraire. « Écrire, c’est partir pour écrire, dit-elle. Avant l’âge de 45 ans, je n’arrivais pas m’y consacrer, car trop de responsabilités familiales et professionnelles pesaient sur mes épaules. Maintenant, j’y parviens, mais plus encore qu’une rupture avec le quotidien, il me semble que l’écriture est une mise en mouvement, un effort, un déplacement mental et physique. »

Extrait R.B. pour Ernest

Ernest est un média décomplexé, accessible, passionné, festif, rêveur, turbulent, drôle et enjoué. Il vous parle d’égal à égal, ne cherche pas à vous épater et est pour vous, un bon copain ou une bonne copine qui donne des shoots de plaisir de lecture. Chez Ernest, le livre est un objet de désir, un objet sexy. Ici, on aime exposer ses livres, les désirer, les rendre attractifs. Un livre est avant tout un jouet. Ce n’est pas le livre qui est sacré, c’est le plaisir qu’il donne aux gens.

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