Une vie pleine de livres et d’amitié, Michèle Gazier, par Pierre Ahnne

Pierre Ahnne est écrivain et a créé un blog littéraire. Il réalise des lectures-diagnostic sur les manuscrits qui lui sont confiés et partage chaque mois un de ses articles sur L’Inventoire.

Contrairement à ce que le titre, étrangement plat, suggère, il y a assez peu de livres dans le livre de Michèle Gazier. Entendons-nous : il n’est question que de cela. Mais celle qui, de son propre aveu, a pratiqué tous les métiers de la chaîne du livre, sauf libraire, ne s’aventure dans aucune analyse, examen stylistique ou même résumé de roman. L’originalité de son ouvrage réside justement dans le fait qu’on y demeure autour des livres, parmi les effets qu’ils produisent et les rencontres qu’ils occasionnent.

Noms connus, cascades et courses

Peu de « livres », mais beaucoup d’« amitié ». Pratiquement chaque entretien avec un écrivain (parmi lesquels beaucoup prennent la forme d’interviews réalisées sur commande par celle qui fut longtemps une critique littéraire en vue) semble avoir marqué le début d’une vraie relation, affective, profonde, voire essentielle. Ce qu’on a tout de même un peu de mal à croire… On distingue facilement, en fait, les vraies amitiés – avec Nathalie Sarraute, qui ouvre le livre, Semprun, Char ou, curieusement, des artistes extérieurs à la littérature tels Soulage, Botero ou Tapies –, et les autres. Beaucoup d’autres. Dans ce texte qui est aussi le tableau d’une époque et un peu, diraient les médisants, d’un certain univers dit en général germanopratin, il y a, on doit l’avouer, un peu de name-dropping. Et quand, évoquant une conférence donnée jadis à l’université de Montpellier par Alejo Carpentier, l’autrice avoue avoir été « choquée par son étalage (…) d’amitiés célèbres, de rencontres brillantes, de noms (…) tous lus dans les livres de français de [sa] jeune vie d’étudiante », on se demande s’il ne faut pas voir là un peu d’auto-ironie.

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