Écrire à partir de « La Garde-robe » de Sébastien Ministru

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Cette semaine, Béatrice Limon vous propose d’écrire à partir de La Garde-robe, de Sébastien Ministru, (Grasset, collection Le Courage, octobre 2021), et de raconter un personnage par le biais d’un vêtement. Vous pouvez poster vos textes (1500 signes maximum) sur Teams Inventoire jusqu’au 21 mars 2022.
Le livre

Avec La Garde-robe, Sébastien Ministru dit avoir voulu « raconter une femme par ses vêtements (…) Je ne savais qu’une chose : une femme meurt et on découvre qui elle était à travers sa garde-robe. C’est tout. » (Entretien à deux voix, avec Sheila, inspiratrice du personnage de Vera, dans Le Soir).

Ministru a opté pour un dispositif narratif extrêmement original : il met en scène deux nièces de son héroïne, Vera Di Pasquale, inventoriant le dressing de la morte avec celle qui était son amie et sa compagne. Des vêtements de scène spectaculaires, des tenues de soirées sublimes, mais aussi de modestes vêtements de l’enfance ponctuent cette biographie, lui servent de prétextes et de points de repère.

Chaque chapitre, qui porte le nom d’un vêtement, retrace un pan de la vie de Vera, au fur et à mesure de l’inventaire, dans une chronologie irrégulière, très intelligemment construite. La petite fille humiliée qui naît dans un coron et porte une blouse écossaise deviendra secrétaire de direction avec ses trois tailleurs chics, faits main, puis chanteuse à succès dans les années 70, moulée d’une combinaison scintillante, lancée dans un univers où les apparences comptent plus que tout…

Extraits

Chapitre IV – La robe en organza

« Le fourreau d’organza fuchsia était brodé de sequins de nacre, la taille évasée se jetait dans une cascade de taffetas qui finissait loin derrière le pied. Une telle robe ne pouvait exister que parce qu’elle n’avait été portée qu’une seule fois. Quel souvenir transportait-elle, à part celui du parfum de poudre de riz qui s’en dégageait ? Qui l’avait confectionnée ? Le spectacle du vêtement, qui scintillait doucement, mettait les jeunes femmes dans un état de surexcitation qui leur faisait dire qu’elles voyaient parfaitement la scène dont l’habit avait formé le point de mire, qu’elles entendaient clairement le bruit du cristal des coupes de champagnes qu’on avait bues ce soir-là, et même la musique sur laquelle avait dansé Vera car la robe ne pouvait être autre chose qu’une robe de bal. »

Chapitre V – La blouse écossaise

« Vimode était un magasin situé en ville. Ici, on pouvait en un clin d’œil transformer une gamine en un marasme de froufrous et d’organdi blanc, ponctué par des chaussettes et des gants de la même couleur virginale, mais aussi, quand le choix était plus bourgeois, en écolière exemplaire. Ici, on vendait des costumes en panne de velours composés d’un spencer sans col et de culottes courtes que les garçons rechignaient à porter.

Ce jour-là, vers la fin du mois d’août, les parents de Vera se saignèrent pour acheter à son frère quelques vêtements qui lui assureraient une rentrée scolaire digne de son rang de petit coq. Vera, plus jeune et moins gâtée, hérita d’un petit tablier dont le motif à carreaux bleus et verts rappelait quelque chose de vaguement anglais, même si personne dans la famille ne savait où se trouvait l’Angleterre. Le sarreau au col blanc avait cette particularité de se boutonner par l’arrière et réclamait l’aide d’une bonne âme pour arriver à bout d’une dizaine de pressions. »

Proposition d’écriture 

À votre tour, je vous suggère d’écrire à propos d’un vêtement et, par ce biais, d’écrire un moment de la vie du personnage qui le porte, ou l’a porté. Donc, de raconter une personne, en vie ou pas, par un vêtement. Habit de cérémonie, de travail ou de loisirs, tenue portée pour une occasion spéciale, uniforme, costume de scène, déguisement, ce vêtement sera le prétexte pour décrire une scène dans la vie d’un personnage, réel ou imaginaire.

Le vêtement choisi pourra aussi servir à caractériser l’époque à laquelle se déroule votre scène, pour lui donner plus de saveur encore.

Sébastien Ministru

Journaliste belge d’origine sicilienne et sarde, âgé de 60 ans, Sébastien Ministru est l’auteur de deux romans, Apprendre à lire (2018) et La Garde-robe (2021) parus tous deux aux éditions Grasset, dans la collection Le Courage. Il est rédacteur en chef adjoint du magazine Moustique, un hebdomadaire francophone consacré à la culture et à l’actualité générale, et chroniqueur en vue à la RTBF. Il est aussi auteur de pièces de théâtre à grand succès – notamment Cendrillon, ce macho, où il revendique une homosexualité joyeuse et décomplexée – et Ciao Ciao Bambino, où il évoque ses origines italiennes.

Béatrice Limon

Journaliste et formatrice en presse quotidienne régionale pendant vingt-cinq ans, Béatrice Limon a choisi de concilier sa passion de l’écriture et son désir de transmettre en animant des ateliers créatifs et littéraires.

Image de présentation : robe de poupée, réplique d’un modèle Dior, Musée de Granville