Les maisons d’édition qui publient des nouvelles (2/4) ou pas…

Souvent les éditeurs en France hésitent à publier des nouvelles, le roman restant l’art majeur et celui qui touche le plus de lecteurs. Pourtant, certains continuent à la défendre. Parfois, même les « grandes maisons » en publient encore, mais plutôt en traduction, car la nouvelle est plus vivace hors de nos frontières où elle a sa place dans les magazines et les revues universitaires et littéraires.

Avant notre prochain concours de nouvelles, nous avons choisi chaque semaine de rééditer la liste de ceux qui ont choisi de promouvoir « Des textes courts qui en disent long », en mettant en lumière leurs dernières parutions. Aujourd’hui : Semaine 2 sur 8 !

Editions de l’Abat-Jour

Maison d’édition papier et numérique, les éditions de l’Abat-Jour lancent un appel à textes jusqu’au 15 mai 2022 pour sa revue « AMPOULE N°11 » (Juin 2022) : maximum 20.000 signes, avec une illustration. Pour ce numéro papier athématique, sont attendues des nouvelles de 20 000 signes maximum espaces comprises et des propositions graphiques en tous genres (noir et blanc uniquement). Fondées à Bordeaux en octobre 2010 par Franck Joannic, les éditions de l’Abat-Jour ont fait de l’anticonformisme leur marque de fabrique. Elles développent une collection de romans, et de nouvelles (noires), sans esprit de sérieux. La Dernière Goutte publie aussi des ouvrages hybrides, tel cet opus de Tucholsky tiré d’un « traitement » (phase intermédiaire du scénario avant la mise en production) : « Écrite en 1931 pour le cinéma, mais jamais portée à l’écran, l’histoire de Barbara/Paulus fait immanquablement penser à Victor et Victoria (1933) et aux meilleurs films de Lubitsch. Tucholsky y brouille les identités et joue sur la confusion des sentiments« .

 

Le Dilettante

Le fondateur, s’il n’aime pas votre manuscrit ne vous l’envoie pas dire; il se présente d’ailleurs sur son site comme un « despote éclairé » (c’est vraisemblable). Cependant, en vrai découvreur, c’est lui qui a publié le premier recueil de nouvelles d’Eric Holder ainsi que celui d’Anna Gavalda, des années plus tard. Sa production montre une grande cohérence (jusque dans ses couvertures), et des choix axés sur l’humour ou la singularité de l’écriture.

La maison d’édition se définit ainsi sur son site:

Dilettante n. (mot ital.), personne qui s’adonne à une occupation, à un art en amateur, pour son seul plaisir. Personne qui ne se fie qu’aux impulsions de ses goûts. Maison d’édition traditionnelle alternant avec plaisir les rééditions d’auteurs méconnus (Bove, Calet, Forton…) et la découverte de jeunes auteurs talentueux (Gavalda, Page, Ravalec, Rozen…). Publie une douzaine de titres par an.

Hist. Inaugurée en décembre 1984 par l’édition en volume de l’article Grognards & Hussards de Bernard Frank et le premier ouvrage de Éric Holder, Nouvelles du Nord. A commencé par des recueils de nouvelles (genre peu goûté par les grandes maisons), des petites plaquettes à faible tirage (333 ex., 666 ex., etc.).

Aux audacieux, rien n’est impossible, vous pouvez donc toujours envoyer votre manuscrit ! (mais pour la réponse, si elle est négative, je recommande un Martini dry).

Antidata

Antidata est une maison d’édition née en 2004, héritière de la revue du même nom, se donnant pour but d’éditer des textes courts, nouvelles mais aussi dialogues, lettres, ou autres. En dehors de ce format court, elle n’a d’autre ligne éditoriale que les goûts et enthousiasmes de ses membres.

Dernier recueil paru de 13 nouvelles : « Décamper ».

« Alors que la fuite pourrait être plutôt associée à un refus de l’affrontement, et donc à une forme de lâcheté, peu honorable, les diverses sorties de pistes et manœuvres d’évitement évoquées dans ce recueil semblent aboutir à la conclusion inverse : fuir est un réflexe salutaire, et s’apparente parfois même à une ligne de conduite, voire à un genre de vie ».

Editions Parole

Depuis 2004, les éditions Parole se définissent comme des Éleveurs de livres qui accompagnent les textes dans la durée, avec leurs auteurs, pour leur donner le temps de grandir et de trouver leur place. Les premiers ouvrages ont été vendus sur les marchés de Provence. Au fil du temps, des relations durables avec des librairies indépendants se sont affirmé sur tout le territoire francophone. Aujourd’hui ce sont près de 900 libraires qui travaillent les différentes collections du catalogue de Parole.

Collection Main de Femme. L’idée d’une collection d’expressions de femmes s’est imposée dans un format volontairement menu, pour une collection de tranches de vies de femmes.

« J’ai dû vous croiser dans Paris ». Extrait ici : J’ai dû vous croiser dans Paris © Éditions Parole, 2019 (Nommé pour le prix Place aux Nouvelles Lauzerte 2020)

Résumé : Un recueil de vingt-quatre nouvelles, vingt-quatre temps de pause dans la vie de ses personnages, de regards tendres, vifs et fins sur le parcours de ces drôles de créatures qui constituent la faune parisienne.

Editions La Dernière Goutte

Les Editions La Dernière Goutte ont 12 ans d’existence. Si la maison a au début publié des recueils de nouvelles remarqués, elle en publie peu aujourd’hui. Cependant, la roue tourne, alors si vous vous reconnaissez dans le portrait qu’en dresse l’éditeur lui-même, à vos enveloppes ! : « La dernière goutte met en selle des rêves éveillés qui hachurent la réalité d’un sentiment d’étrangeté. Elle défend des textes aux univers forts, grotesques, bizarres ou sombres. Les romans et nouvelles qu’elle publie reflètent la beauté qui miroite dans l’ombre ».

Les éditions de l’Olivier

Les Éditions de l’Olivier sont une maison d’édition française créée par Olivier Cohen en 1991. Ce dernier a édité en français tous les recueils de nouvelles de Raymond Carver. Il a également rétabli la version initiale du manuscrit de « Débutants » (précédemment publié sous le titre: « Parlez-moi d’amour »), à l’initiative de la poétesse Tess Gallagher (c’est-à-dire avant les coupes de Gordon Lish, son premier éditeur américain). Autant dire, qu’Olivier Cohen aime les nouvelles (et Raymond Carver en particulier puisqu’il en a publié dix-sept titres).

Toujours attentives à la nouvelle, les éditions de l’Olivier mettent actuellement en avant sur leur site le recueil d’Etgar Keret « Incident au fond de la galaxie« , sorti mi-mars. Traduites de l’hébreu par Rosie Pinhas-Delpuech, ces vingt-deux nouvelles sont « corrosives et brillantes, et nous immergent dans un univers où le virtuel et le fantastique viennent subtilement troubler la réalité pour faire surgir de profondes réflexions sur le deuil, la solitude et les stigmates de l’Histoire » (4ème). Ca donne envie de le lire !

Dans le domaine français, rappelons le très beau recueil de nouvelles d‘Erwan Desplanques. Mélancolique, désabusé, élégant « Une chance unique » n’était pas passé inaperçu. 

C’est donc une ligne éditoriale qui privilégie le style, et la légèreté d’une écriture moderne. Qu’est-ce que la modernité me direz-vous ? Ce je ne sais quoi qui fait qu’on se sent tous concernés par ce que l’auteur est en train de nous raconter.

Danièle Pétrès

Retrouvez l’article N°1