L’édition de textes courts est actuellement en pleine mutation. Affirmation de la poésie narrative dans le paysage éditorial, recueils de fragments biographiques composés en romans, recueils de nouvelles thématiques… Le stage « Constituer son recueil », animé par Laurence Faure les 3 et 20 juin 2023 est l’occasion de réfléchir à la construction de ces nouveaux formats.

Tous ceux qui suivent des ateliers d’écriture le savent, le plaisir d’écrire est infini, et les pistes d’écriture innombrables. Après plusieurs années de pratique néanmoins, les récits s’amoncèlent. Parfois surgissent des poèmes, fragments, chroniques, nouvelles, carnets de bord. Mais comment envisager de réunir un matériau souvent disparate ?

C’est en constituant un recueil des textes qui comptent le plus pour nous (ceux qui restent en mémoire après les avoir maintes fois relus), qu’il est possible de trouver la voie vers la construction d’un livre. Laurence Faure présentera toutes sortes de formats : fragments de voyage, textes courts, et même recettes de cuisine, puisqu’un livre est avant tout un recueil constitué de pièces qui se répondent l’une à l’autre, avec un certain ordre et une progression.

Pendant un 1er week-end, elle proposera autour de notions simples, comme la ligne directrice et  la forme, d’envisager la nature des textes issus des ateliers : fragments, aphorismes, poésies, nouvelles, en prenant appui sur la lecture des extraits de textes des participants. Chacun pourra réfléchir à sa notion du recueil. Un mois après, il sera question d’avancer sur ses choix (en envisageant les textes à ajouter ou à retirer). Une manière concrète d’interroger son désir de livre, et d’avancer dans son projet.

Danièle Pétrès

Pour aller plus loin :

Linor Goralik, « Trente-quatre récits très courts et assez courts », Monts Métalifères éditions (2022)

Ce recueil mêle récits de quatre lignes à cinq pages d’un ton enlevé, où la densité se rapproche du poème ou des nouvelles de Brautigan, pour décrire des situations et des émotions de personnages pris à un instant décisif (ou pas du tout), de leur vie quotidienne.

Extraits

« Panadol »

Alors il est allé dans la chambre et a embrassé toutes ses robes, une par une, mais ça n’a pas aidé non plus.  p. 45

« En position »

« Il se mit enfin à croire en Dieu quand il comprit qu’après chaque nouvelle salve de hurlements rauques, conclue par un « Au sol, en position ! » furieux et postillonnant, il parvenait, à bout de forces, le visage plaqué dans la gadoue nauséabonde du terrain militaire d’octobre, à sentir, pour des raisons parfaitement inexplicables, une odeur pure, vertigineuse, de lilas ».  p. 25

Monts métallifères est  maison d’édition fondée en 2021 par Lilas Carpentier et Guillaume Mélère. Elle édite des ouvrages stylistiquement surprenants, capables de jouer avec les règles et les conventions. « Trente-quatre récits très courts et assez courts » réunit des microfictions de Linor Goralik, autrice née en 1975. (Traduit du russe par Daria Skorobogatova).

Recueil d’Antoine Wauters « Le musée des contradictions » (Prix Goncourt de la nouvelle 2022), Éditions du Sous-sol.

« Des voix s’élèvent, s’approchent du centre de la scène qu’est ce livre et s’expriment. Ici, l’homme n’est ni bon ni mauvais. Il hésite, souffre, espère et doute, comme nous tous. N’est-ce pas là l’expérience qui est la nôtre aujourd’hui ? Chercher tant bien que mal à accorder nos paroles et nos actes ? Tenter de trouver du sens là où il n’y en a plus ? Voir que les choses sont sans espoir, et pourtant être résolu à vouloir les changer ?
Une adresse aux lecteurs qui intensifie la poésie, une façon de se réapproprier le discours sous forme de nouvelles. Antoine Wauters va toujours plus avant dans l’exploration des frontières du roman » 
(extrait de presse).

 

 

 

Arthur Teboul « Le déversoir. Poèmes minutes » (Editions Seghers, 2023)

Premier recueil de poésie d’Arthur Teboul, auteur et chanteur du groupe Feu! Chatterton, ses poèmes ont été écrits en quelques minutes, entre concerts et confinements, sur sept ans. L’agencement des poèmes s’est fait en toute fin de l’écriture. Une recherche de la joie, traversée de mélancolie.

« Arthur Teboul confesse qu’il est venu à la musique par la littérature. Il plaide pour une existence où la poésie aurait une plus grande part. De fait, entre les phases d’écriture des chansons de ses albums, il a pris l’habitude de composer ce qu’il appelle des poèmes minute, lors de séances de  » déversement  » ou d’écriture automatique. Entre le poème en prose et le récit onirique, ce sont de courts textes dont les idées et les émotions seraient les protagonistes, riches en inventions, pleins de mystère, de vivacité, de drôlerie, d’étrangeté et de beauté. Ils composent ce recueil, Le Déversoir« .