Ecrire à partir de « Premier Sang » d’Amélie Nothomb

Cette semaine, Laurence Faure vous propose d’écrire à partir de “Premier Sang” (Éditions Albin Michel, 2021) d’Amélie Nothomb, qui vient de recevoir le Prix Renaudot 2021. Une proposition d’écriture qui invite à travailler le ton du récit d’une scène familiale, que nous vous laissons découvrir en fin d’article.

Vous pouvez poster vos textes (1500  signes maximum) sur Teams Inventoire jusqu’au 17 NOVEMBRE 2021.

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Premier sang ou la force de la survie en milieu hostile

Il ne faut pas sous-estimer la rage de survivre, nous dit la 4ème de couverture…

Amélie Nothomb, vous connaissez ? Cette autrice publie régulièrement depuis 1992 et « Premier sang » est son centième manuscrit et le trentième publié depuis le premier, « Hygiène de l’assassin ». Elle compose ici un roman à partir d’événements réels tout en étant, pour moi, proche du conte.

L’autrice aime les personnages monstrueux, démesurés. Ici, un homme inspiré de son père, le diplomate belge Patrick Nothomb, mort en mars 2020, auquel elle rend un bel hommage. Ce monstre de tendresse et de sensibilité, si j’ose dire, déploie son énergie à s’adapter aux situations et personnes tout en gardant sa soif de vivre. Désintérêt d’une mère, égoïsme d’un grand-père paternel, poète en son château, guerre, prise d’otages… il affrontera tout avant de parvenir enfin à épouser sa belle !

Il y a de l’atmosphère du conte dans cet ouvrage où nous suivons un petit garçon devenu jeune homme, timide, à la fois tendre et surprenant. Cet anti-héros conduit et traverse tout le livre avec l’énergie d’un personnage digne des frères Grimm ou d’Andersen. Valeureux et positif, il grandit dans les épreuves tout en restant lui-même, des Ardennes au Congo.

Nous le suivons également grâce à une écriture qui maintient continuellement un décalage : le lecteur comprend clairement que les situations racontées sont rudes mais celui qui les raconte semble les avoir vécues avec une énergie naïve. Pudique, il n’exprime ni douleur ni désespoir, mais tente de participer à sa mesure. Il s’en dégage une formidable empathie de lecture. Oui, la rage de SURvivre donne à ce roman une teneur particulière. Le narrateur réussit à chausser les bottes (de sept lieues) de la joie participative et nous entraîne, malgré la faim, le sang, le manque de tendresse familiale et les délires poétiques ou politiques…

Extraits

Dans le roman, le narrateur doit partir en vacances chez son grand-père paternel pour la première fois. On lui prépare une valise emplie de vêtements et de douceurs à déguster, on l’habille d’un magnifique costume marin. Il arrive dans un château et découvre des grands parents ainsi que des oncles et tantes qui ont son âge, le tout dans une ambiance surprenante :

Il me fallut du sang froid pour rejoindre la tribu dans la salle à manger. Le moins qu’on puisse dire, c’est qu’on ne m’y attendait pas.

Le maître et la maîtresse de maison étaient assis au bout d’une longue table et entourés d’une jeune fille de dix-huit ans et d’un garçon de seize ans, qui appartenaient à une autre sphère. Le peuple des enfants occupait la moitié déshéritée, celle où il n’y avait même pas de pain. Il allait de soi que j’y avais, sinon ma place, du moins mon emplacement.

Mon grand-père prit le plat de viande et se servit, ensuite il tendit le plat à son épouse, qui en prit aussi peu que son mari en avait pris beaucoup et le passa après à la jeune fille. Ainsi procéda-t-on pour chaque plat…. Le droit d’aînesse se traduisait chez les Nothomb d’une manière alimentaire : plus on était âgé, plus on pouvait espérer manger. Quand les plats arrivèrent à Charles et moi, ils étaient presque vides….

–          Pourquoi seuls les grands ont de quoi manger ?

–          C’est comme ça. Si tu atteins l’âge de seize ans, tu seras nourri.

–          Toi et moi, on a encore dix ans à attendre, déclarai-je.

–          C’est pas gagné. Mais toi, tu n’es ici que pour les vacances. Tu survivras.

J’éprouvais une admiration profonde pour ces enfants qui supportaient des conditions d’existence aussi spéciales. Si j’avais été plus âgé, j’aurais songé à m’insurger contre le règlement à ce point scandaleux. A six ans, je n’avais qu’une obsession : m’adapter.

Pages 46 à 48

Et c’est ainsi qu’il s’adaptera aux desserts à la rhubarbe, à devenir goal, à s’endormir en ayant froid et peur du bruit de la chouette, et à revenir chez lui amaigri et les vêtements sales… Jusqu’à répondre à la grand-mère poussant un cri constatant le triste état de son costume marin désormais maculé

Ça m’est égal, dis-je crânement.

Je le pensais, j’avais adoré cette expérience.

Page 52

Proposition d’écriture (ton du récit)

Je vous propose ici de raconter une scène familiale, en jouant du décalage, comme raconter la sécheresse d’un premier rendez-vous de jeu avec des cousins avec entrain, la violence ou l’étrangeté d’un repas de famille à Noël avec humour…

Choisissez une première fois, un premier contact (personne, lieu, activité) dans une scène racontée au JE par un narrateur ou une narratrice qui tente de participer du mieux qu’il peut !

(Maximum 1500 signes espaces compris).

Si vous participez pour la première fois à cet atelier, rendez-vous ici